Le marché du halal à l’international

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Le marché du halal à l’international : un pari gagnant mais compliqué

Les entreprises françaises sont loin d’être insensibles à la manne financière que représente le marché du halal. Mais pour se lancer sur ce secteur, mieux vaut en connaître tous les rouages, surtout lorsque l’on vise à exporter. Dans ce sens, Ubifrance, l’agence publique pour le développement international des entreprises, fournit des conseils et informations précieux. Elle organisait, la matinée du mercredi 27 juin, un atelier intitulé « Tout savoir pour aborder le marché des produits halal vers les pays tiers ». Une aide bienvenue pour les entreprises venues chercher des réponses à leurs interrogations.

 « Le marché du halal présente un potentiel de 448 milliards d’euros, en croissance de 10 % par an », a indiqué François Matraire, le directeur du bureau de la Malaisie d’Ubifrance. Des chiffres qui font rêver la trentaine de représentants d’entreprises présents à l’atelier.

François Matraire, qui intervenait via une visioconférence en direct de Malaisie, a invité les entreprises françaises à exporter dans ce pays où 15,4 millions de personnes sont musulmanes.

Un marché du halal au potentiel énorme  

Pour M. Matraire, les entreprises françaises ont tout intérêt à s’implanter dans ce pays comme l’ont déjà fait les Italiens et les Espagnols. « Dans le secteur des produits gourmets, le marché est en hausse de 15 % », a t-il précisé, en regrettant que l’offre française y soit « sous-représentée », alors que la France est le « pays de la gastronomie ».

Pas de doute, le marché du halal est un secteur plus que prometteur pour les entreprises. Dans le monde, il concerne 1,6 milliard de consommateurs. Et en Asie, il est très porteur avec de grands pays musulmans comme l’Indonésie et la Malaisie.

De plus, tous types d’entreprises peuvent espérer se lancer sur ce marché en pleine croissance, car il ne concerne pas seulement les produits « carnés » à base de viandes mais aussi tous les autres biens de consommation comme les cosmétiques mais aussi l’univers de la logistique.

Un parcours du combattant  

Ce tableau du marché halal à l’international semble idyllique mais encore faut-il parvenir à s’y implanter. En effet, obtenir les certifications halal qui permettent de commercialiser dans un pays donné ses produits n’est pas toujours simple. Le cas de la Malaisie est frappant. Dans ce pays où il est impossible d’exporter des produits carnés non halal, une seule certification halal permet d’obtenir son passeport pour l’exportation de ces types de biens : celle qui est délivrée par le Jakim, l’organisme de certification centralisé de l’Etat malaisien.

Très rigoureux, il contrôle et vérifie minutieusement chaque produit avant d’accepter ou non de délivrer sa certification halal. Il n’est pas évident de la recevoir car la Standards Malaysia qui définit la norme halal du pays est l’une « des plus structurées et des plus sérieuses » au monde, a commenté François Matraire. En France, seule la Grande Mosquée de Lyon est reconnue par le Jakim.

En Malaisie, le parcours est donc long et semé d’embûches. Noureddine Ghilli, le gérant de Terroir Halal, une société de charcuterie halal, l’a appris à ses dépens. Revenu plein d’espoir du Salon international du halal de Malaisie (MIHAS) où il avait pu obtenir de nombreux contrats, il a vite déchanté. Depuis le mois d’avril, ses démarches pour obtenir le certificat du Jakim n’ont encore rien donné. « Cet organisme demande beaucoup beaucoup de papiers », déplore-t-il. Résultat, il est en « train de perdre des clients ».

Les entreprises peuvent tout de même se rassurer car, dans les autres zones du monde où la population musulmane est forte, la réglementation n’est pas aussi stricte comme au Moyen-Orient et au Maghreb. Aucune condition particulière n’y est demandée. D’ailleurs, le gérant de Terroir Halal a pu facilement y exporter ses produits.

Tout, sauf la France

Mais pourquoi chercher la difficulté à l’étranger alors que la France est un terreau pour le marché halal ? Ce pays, qui compte cinq millions de musulmans selon les estimations, n’a rien à envier aux pays musulmans du globe. Le marché du halal y est en constante évolution. D’ailleurs, au Maroc, les interrogations sur le halal ont été amorcées par les Marocains de France, nous révèle Mohamed El Ouahdoudi, président de Convention France-Maghreb, un réseau de ressources humaines et d’entrepreneuriat reliant l’Hexagone et le Maghreb.

Pourtant, les entreprises françaises semblent plus intéressées par l’exportation. Il faut dire que dans l’Hexagone le climat qui entoure le terme « halal » est loin d’être favorable. Les polémiques à répétitions allant du Quick halal à la dernière campagne présidentielle axée sur ce thème en font une mauvaise publicité. Aujourd’hui, il n’est pas bon de parler du halal en France.

La société CBFC en a fait les frais. Elle a eu du mal à démarcher des enseignes dans cette ambiance négative, nous dit-on. Chantal Japhet, la directrice générale de la société qui commercialise les cosmétiques halal Jamal, a pu revenir sur son expérience, en indiquant que les ventes de ses produits de beauté sont beaucoup « plus faciles à l’export qu’en France ». Moyennant 5 000 € par an, ses cosmétiques sont certifiés par la Grande Mosquée de Paris.

L’exportation de produits halal paraît moins compliquée pour des entreprises soucieuses de leur image. Notons que les représentants de grands groupes comme L’Oréal et Lesieur étaient présents à l’atelier d’Ubifrance.

Vers plusieurs « halal » ?

A l’export ou sur le territoire national, la certification halal reste un sésame important pour les entreprises. Elle est nécessaire. D’ailleurs, depuis cette année, la certification halal est obligatoire sur tous les étiquetages en Algérie.

Mais les certifications halal restent une jungle dans laquelle il ne faut pas se perdre. Chaque pays a ses normes et certaines sont très strictes, comme on l’a vu en Malaisie. En France, plusieurs certifications existent. Aux entreprises de choisir celles qui peuvent avoir le meilleur impact sur la population cible.

Certains rêvent déjà d’une norme halal internationale. Dans un désir de conquête du marché, la Malaisie a l’ambition que sa norme devienne mondiale. C’est bien parti, car elle jouit déjà d’une renommée mondiale et des pays comme l’Indonésie et le Kazakhstan l’ont déjà adoptée.

Mais venu annoncer la tenue au mois de septembre de l’Expo halal international à Meknès, au Maroc, Mohamed El Ouahdoudi ne croit pas vraiment à une norme internationale, même si le Maroc qui va prochainement mettre en place la sienne, fondée sur celle de l’Indonésie. « On va vers une norme halal pour chaque pays », analyse-t-il, en indiquant que, pour lui, des normes différentes ne sont pas un problème car cela permet de « respecter les diversités culturelles de chaque pays » et surtout de « préserver l’agriculture traditionnelle » face aux géants industriels.

Ces politiques protectionnistes sont bien présentes dans l’esprit des Etats, qui veulent avant tout protéger leur marché et faire face à la concurrence comme la Malaisie a pu le faire en réponse à la menace chinoise.

Cependant, comme Ala’a Gafouri, directeur du Halal Institute Food Management Industry (HIFMI) de Paris, l’a rappelé, il ne faut pas oublier que le halal est avant tout « un acte d’adoration ».

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